Réussir ses photos urbaines

Présences urbaines

Il est évident qu’il est aujourd’hui impossible , dans la plupart des villes de photographier à la manière d’un Cartier-Bresson, d’un Doisneau ou d’un Ronis. Disons-le sans nostalgie, ni ressentiment: les choses ont changé et le photographe urbain doit s’adapter à son environnement social et politique. C’est même là un des fondements de la photographie de reportage: être un témoignage direct de son époque, même si celle-ci ne lui facilite pas le boulot !

Pourtant tout n’est pas négatif dans l’époque actuelle. D’abord les reflex numériques permettent des prises de vues rapides quelle que soit la lumière. Ce que nous avons gagné en facilité technique, nous l’avons perdu en facilité d’approche et en “naïveté”

Photographier des passants vu de profil

Saisir des présences humaines de profil demande une certaine anticipation.

Il faut d’abord repérer un arrière-plan intéressant qui permettra à la silhouette humaine de se détacher. Il s’agira le plus souvent d’une façade ou d’un mur choisi pour sa matière, sa couleur ou le jeu de lumière qui s’y applique. Une fois le décor planté, il faut peaufiner son cadrage, trouver la bonne distance et la bonne focale.

Pour l’exposition, on privilégiera des vitesses rapides: le 1/125 s est le minimum si le sujet est relativement éloigné. Sinon le 1/250s, voire le 1/500 s s’impose.

Rappelez-vous que plus un sujet en mouvement est près, plus il faut une vitesse rapide pour le figer.

Grâce aux hautes sensibilités offertes par les reflex numériques. Une fois tous ces réglages calés, il ne reste plus qu’à attendre sa “proie”, c’est-à-dire l’homme ou la femme qui va venir s’inscrire judicieusement dans l’espace délimité. Bien sûr cela ne marche pas à tous les coups, et parfois on rentre bredouille.

Mais, si l’on a bien choisi son point de vue ( et que le lieu n’est pas désert ), la patience et la persévérance sont généralement couronnées de succès.

Prise de vue du scooter sur un fond très coloré et contrasté – Hubert Marot ©

Joggeur sur le remblai, attendre que le joggeur vienne s’inscrire judicieusement dans l’espace délimité – Hubert Marot ©

 

Prises de vue frontales

Photographier de face est un exercice plus délicat.

En effet, il va falloir adopter une attitude qui corresponde à sa personnalité et à sa timidité. Premier conseil oubliez les longues focales. Si vous êtes un adepte des zooms, calez-vous sur une focale (souvent la plus courte) et n’en changer plus ! C’est au photographe d’aller au-devant de son sujet, la photo “humaniste” n’a rien à voir avec la chasse animalière !

De plus, sur le plan technique, un zoom de type 18-200mm ou 28-200mm utilisé au-delà du 100 mm pose de gros problèmes à l’autofocus de son reflex quand le sujet se dirige vers l’opérateur ( IAF est plus efficace pour les déplacements latéraux ).

Du coup, une focale fixe de type 28 mm ou 35 mm sera toujours préférable dans ce genre d’image, autant par la rapidité d’action que par la discrétion qu’elle induit. Si vous êtes un casse-cou à la William Klein, rien ne vous interdit de “viser” ceux qui vous croisent et de déclencher à bout portant.

Certains gardent le boîtier autour du coup et ” shootent ” en aveugle avec un déclencheur souple dissimulé dans leur poche. Pour ma part, je préfère adopter d’autres approches en profitant des situations que m’offre la ville. Le plus facile est d’opérer lors de fêtes ou de défilés. On peu aussi utiliser le mobilier urbain.

Prise de vue à la terrasse du bar de la piscine, à la volée et en contre- plongée avec un objectif 24mm – Hubert Marot ©

Deux femmes devant une boutique de souvenirs à la Chaume, prises de fou rire. – Hubert Marot ©

 

Instantanés captés de dos

Sur le plan pratique, c’est sans doute le point de vue le plus facile à mettre en oeuvre.

En effet, on peut agir de façon discrète et il y a peu de chance de se voir attaquer pour atteinte au ” droit à l’image” quand on ne montre pas un visage.

Toutefois, sur le plan visuel et graphique, c’est sans doute l’exercice le plus délicat. En effet, s’il est possible de justifier un cadrage aléatoire quand l’image représente un visage de face, fort et détonnant, quand on cadre un homme ou une femme de dos, il faut réussir à intégrer d’autres éléments dans son image pour obtenir une composition qui retienne l’attention. La première approche possibles scruter en gros plan des détails de calvitie ou de boucles d’oreilles. On peut aussi se concentrer sur les vêtements et faire résonner les motifs d’un tee-shirt ou d’une chemise ect. )
On pourra adopter soit des approches ” poétiques”, soit des approches “graphiques”. Dans les deux cas, c’est la lumière et les contrastes de couleurs qui feront le sens de votre composition. La silhouette humaine vue de dos a un pouvoir d’évocation : ne pas voir le visage permet à l’imaginaire de s’engouffrer. Une photo sera réussie si elle vous donne envie d’en voir plus d’en s’avoir plus sur ce mystérieux dos qui s’enfuit…

 

Personnes prise de dos devant le phare, le couple avec des vêtements colorés face au phare. – Hubert Marot ©

Prise de vue de dos à la plage, détail sur la chevelure de la femme – Hubert Marot ©

Gros plan sur le sac a dos original – Hubert Marot ©

Prise de vue de dos sur le sujet coloré du manteau – Hubert Marot ©

 

Photographier la ville et ses passants reste un des grands thèmes classiques.

C’est à la fois facile d’accès (toute ville est a priori un “théâtre” de geste et d’attitudes) et délicat à réussir. En effet, il faut déjà se débarrasser de toutes les contraintes techniques pour se concentrer sur le cadrage. C’est pourquoi, la technique la plus efficace est de trouver un lieu “photographique” et d’attendre que dans l’espace, les déplacements simultanés des passants s’organisent. Préférez les courtes focales, la réussite de votre photo dépendra du choix de l’arrière plan (capital!) et de votre capacité à saisir des silhouettes graphiques.

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Auteur : Hubert Marot

Hubert Marot
Auteur / photographe depuis 1996, autodidacte membre de l'UPP (Union des Photographes. Professionnels) et adhérant à la SAIF (Société des Auteurs des Arts Visuels et de l'Image Fixe ). C'est en 1968 que j'ai découvert la photographie en tant qu'assistant de Robert Jean Chapuis (photographe de mode). Agence Vloo en 1973 depuis je me suis consacre plus particulièrement à la photographie de voyage puis et à l'errance urbaine, les gens de la rue, un regard photographique sur notre environnement social et urbain. Posez vos questions à Hubert Marot, Spécialiste « Photographie »
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